František Kupka 1871—1957

L’idole noire 1901

Fusain et gouache sur papier avec filigrane, 490 × 425 mm
Signé en bas à droite : “Kupka”.

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Le dessin L’idole noire – Résistance est une variante de l’une des quatre estampes graphiques du célèbre ensemble de Kupka, La Voix du silence. Le nom de la série fait référence à La Voix du Silence (1889) de la théosophe Helena P. Blavatská. La série d’images est un memento visuel représentant un chercheur moderne qui devrait se tourner non seulement vers les grandes civilisations de l’Antiquité, mais également vers les lois de l’univers cosmique. L’idole noire s’inspire du poème de 1844 d’Edgar Allan Poe Terre de songe, racontant l’histoire d’un pèlerin voyageant dans un paysage obscur et solitaire où Eidolon, appelé la Nuit, est assis droit sur un trône noir. C’est un paysage sauvage aux eaux solitaires et mortes, où le pèlerin trouve des souvenirs superposés du passé. La scène est dominée par une figure colossale du régnant à la tête de sphinx. Eidolon, en grec une image, une idole, une révélation ou un fantôme, a en théosophie le sens du double astral de l’être humain.

František Kupka, Idole noire – Résistance 1903, gravure de couleur à l’aquatinte.

À propos de l’auteur

Après les études aux académies de Prague et de Vienne, František Kupka a d’abord travaillé en 1896 comme illustrateur pour des magazines de mode à Paris. Cependant, avec une inclination progressive vers le mouvement anarchiste, il se consacre dès 1900 de plus en plus au dessin politique et satirique. Trois de ses albums d’auteurs (Argent, Religion et Paix), qu’il créait de 1901 à 1904 pour le magazine satirique L’Assiette au Beurre, ont abouti au succès à échelle internationale. Il contribua aussi par ses œuvres à d’autres périodiques comme le magazine humoristique Le Rire, le journal anarchiste Temps Nouveaux, la revue visuelle Illustration, le journal Art Nouveau Cocorico ou enfin l’hebdomadaire politico-satirique Canard sauvage. Parallèlement, à partir de 1899, il publie des estampes socialement critiques et ésotériques, telles que Les fous, Résistance (L’Idole noire) et La Voix du silence, qui résultent de ses prises de position politiques anarchistes et de ses expériences de spiritisme (pour lesquelles il était également proche d’Alfons Mucha). Dans les années 1904 et 1905, il illustre le travail du géographe anarchiste Elisée Recuse, L’Homme et la Terre, dans lequel il résume ses pensées et sa profonde connaissance des principes physiques et spirituels sur les questions de la création, de la composition et de l’existence de l’univers. Il les introduits avec un contenu abstrait, ne faisant que se situer à quelques pas des considérations sur abstraction en tant que telle. Quelques années plus tard, vers 1910, tout en se défendant au départ d’une étiquette abstraite, il se rendit compte que l’artiste en position de créateur dispose du même point de départ qu’un hypothétique Créateur avec grand C: en effet, il se tient devant une toile vide qu’il remplit à la fois d’éléments aléatoires autant que causaux, s’il s’agit donc de points de couleur, de surfaces ou d’autres formes qui, par leur interaction, évoquent des associations et des émotions, c’est-à-dire sur le même principe que lorsque le monde est créé ou lorsque dans le monde des sons, une musique est créée. Le terme orphisme inventé par Apollinaire pour ce type particulier de raisonnement abstrait, était très différent du concept d’abstraction issu du cubisme analytique ; c’est en réalité son contraire, le concept synthétique, la véritable création dans l’art plastique a été également envisagé par Kupka et ses amis du groupe Puteaux. En 1912, Kupka fut l’un des premiers peintres au Salon d'automne de Paris à oser exposer des peintures purement abstraites : il s’agissait du tableau Amorpha, une fugue à deux couleurs et Chromatique chaude. La réaction de la critique de ses contemporains a été, comme c’est souvent le cas dans l’art, plus ou moins négative, mais ceci n’a en aucun cas découragé Kupka à développer davantage sa pensée abstraite. Bien qu’il ne soit pas entrée tout au début dans le panthéon de la genèse de l’art abstrait, il a su attiré l’attention, dans la période de l’entre-deux-guerres, des galeries françaises et mondiales, par exemple à travers son appartenance à l’association internationale des artistes Abstraction – Création et aussi par le billet de plusieurs expositions basées sur des variations et séries de peintures purement abstraites (sa première exposition individuelle a eu lieu en 1922 à la galerie Povolozky avec adresse 13, rue Bonaparte ; la dernière avant la guerre fut celle avec Alfons Mucha en 1937 au Jeu de Paume). Hélas, il n’assistera pas à sa première grande rétrospective parisienne d’après-guerre au Musée national d’art moderne à Paris en 1958. Il meurt à Puteaux le 24 juin 1957. Il est aujourd’hui reconnu comme l’un des trois principaux fondateurs de l’art abstrait dans le monde et reste le peintre tchèque le plus connu, ainsi que le plus cher, de l’histoire.

Historique des expositions

František Kupka 1871–1957, Galerie nationale de Prague, 07/09/2018 – 20/01/2019.

Sen ve snu: Edgar Allan Poe a umění v českých zemích, Galerie nationale de Prague, 06/03/2020 – 22/11/2020

Littérature

Anna Pravdová, Markéta Theinhardt, eds., František Kupka 1871–1957. Národní galerie Praha en collaboration avec Réunion des musées nationaux – Grand Palais a Ateneum Art Museum, Finnish National Gallery, 2018, reproduction p. 19.

Provenance

Dr. Pavel Hess de Mariánské Lázně.

Collection privée, Paris.