La vague (1904–1905) de František Kupka, qui fait partie d’un cycle de 100 illustrations nommé L’homme et la Terre, est devenue, pour de nombreuses raisons, la peinture phare de l’exposition. Chez Pro arte, nous pensons que l’ensemble de ce cycle (1904–1906) marque une étape décisive non seulement dans le parcours de Kupka et son passage de la figuration à l’abstraction, mais également dans celui de l’art moderne du XXe siècle. Évidemment, une vague d’autres artistes tchèques a suivi la lignée de Kupka dans la naissance de ce nouveau genre pictural dans un contexte européen en retard. C’est pour cela que la première exposition organisée par Pro arte dans sa nouvelle galerie porte sur une place assez restreinte de l’œuvre, qui peut être considérée comme la base incontournable de l’art moderne tchèque. Dans cet avant-goût d’exposition, deux autres œuvres étaient présentées :
Le portrait de Louise-Denise Germain (1922), probablement le premier tableau parisien de Josef Šíma, représente tout ce pour quoi Šíma est reconnu aujourd’hui en France, à savoir cette expression émotionnelle exceptionnelle, qui le conduit du seuil du paradis et de l’au-delà aux portes du surréalisme. Louise-Denise Germain était une prestigieuse artiste parisienne dans le domaine de la reliure de livre. À la recherche d’un emploi à son arrivée à Paris, Šíma s’était présentée à son atelier. Non seulement, elle l’embaucha, mais elle l’autorisa aussi à épouser sa fille, peu de temps après.
Le paradis des noirs (1925) de Toyen est probablement la pièce la plus importante du portfolio de Pro arte. Elle fut seulement exposée une fois par le passé, pour des raisons qui peuvent se comprendre. Elle sera de nouveau, après une longue absence, présentée au public. C’est à l’automne 1925, lors de sa première visite à Paris, en compagnie de Jindřich Štyrský, que Toyen découvre la Revue Négre avec la célèbre Josephine Baker. La désinvolture et l’exubérance érotique dont l’actrice fait preuve ont tellement impressionnées l’artiste, qu’elle s’en est inspirée pour imaginer un paradis éloigné de tous tabous éthiques, esthétiques ou voir même érotiques.
Parmi les autres peintures présentées seront les œuvres d’Emil Filla, Jan Zrzavý, Jindřich Štyrský, Josef Váchal, Jakub Obrovský, Georges Kars, Maxim Kopf, Emil Orlik, František Matoušek, ainsi que d’autres artistes du modernisme tchèque. Certains des tableaux sont des œuvres très connus, d’autres seront des découvertes – cela fait d’elles des œuvres spéciales, qui font que leur acquisition au fonds permet à plusieurs reprises et à de nombreuses institutions la négociation de leur achat. À Paris, le fonds a permis au Musée des Marionnettes de Chrudim de recevoir la mondialement connue marionnette de la danseuse d’Edgard Degas ; ou à Alšova jihočeská galerie à Hluboká nad Vltavou, l’un des plus importants tableaux tchèques du XIXe siècle, à savoir La prière pour le pendu de Soběslav Pinkas. Considérée comme disparue pendant plus de 100 ans, elle fut découverte par le personnel du fonds et a été acquise lors d’une vente aux enchères à Dijon.